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  • Critiques des films du Festival Télérama à voir au Cinéville de Laval

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    Cette semaine, grâce au Festival Télérama, vous pourrez voir ou revoir les grands films de l'année 2016 au Cinéville de Laval (retrouvez les horaires en cliquant ici). Voici ma sélection et mes critiques des films à l'affiche pour cette semaine.

    Critique de FRANTZ de François Ozon

    Voici le film que je considère comme le meilleur film de l'année. Et si vous voulez savoir pourquoi, retrouvez ma critique ci-dessous, publiée lors de la sortie en salles de "Frantz". Retrouvez également mon top cinéma 2016 en cliquant ici.

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    A Deauville, le dernier jour du 42ème Festival du Cinéma Américain, j’ai ignominieusement été infidèle au festival l’espace de deux heures pour aller au Morny, le cinéma de la ville, pour voir  (enfin !) « Frantz », le nouveau film de François Ozon, que j’attendais avec tant d’impatience de découvrir. Dehors régnait un soleil resplendissant  et irréel mais un film en noir et blanc m’attendait et rien, pas même cet astre insolemment radieux, n’aurait pu me dévier de ma route. Malgré le festival, les spectateurs étaient nombreux, comme moi, à avoir fait l’école buissonnière pour aller à la rencontre de « Frantz ». En un quart de seconde, ce moment délicieux où vous entrez dans un film, avec prudence et délectation, comme lorsque retentissent les premières notes d’une musique brisant le silence, espérées et redoutées, qui vous transportent ou vous laissent sur le bord du chemin, Frantz m’a emportée dans sa valse poétique pour, en un instant, éclipser Deauville et le soleil et la réalité.  

    Comme chez Woody Allen, les scènes d’exposition chez Ozon sont toujours époustouflantes de maitrise. Le cinéaste a le don, en un éclair, de happer le spectateur et de le plonger dans son univers. Je me souviens encore de la maestria des premiers plans trompeurs de son précédent film  Une nouvelle amie, des plans qui donnent l’illusion qu’une femme se prépare pour une cérémonie de mariage…qui est en fait son enterrement. Tout est dit, déjà, dans le premier plan (le deuil, l’apparence trompeuse, l’illusion, le double, la double identité) qui témoigne du sens aigu et magistral de la manipulation du cinéaste qui culminait dans son film Dans la maison,  labyrinthe joyeusement immoral, drôle et cruel. Ici, dans Frantz, même maestria et thématiques similaires : deuil, illusion, double…

    1919. Le noir et blanc. Les cloches d’une église qui retentissent. Et me voilà au lendemain de la guerre 1914-1918, dans une petite ville allemande. Anna (Paula Beer), tous les jours, se rend sur la tombe de son fiancé, Frantz, tué sur le front en France. Les premières minutes sont placées sous le sceau du deuil, sa douleur sourde et indicible, incomprise, notamment celle du père de Frantz. Et puis une silhouette fantomatique apparaît, furtivement, un homme de dos, courant dans la rue. C’est ensuite au cimetière qu’Anna le verra, sur la tombe de Frantz : Adrien Rivoire (Pierre Niney). Quand le nom de l’un rime avec la France, celui de l’autre rime avec miroir et revoir. Ozon déjà sème quelques indices. Adrien dit être un ami français de Frantz (francophile au point d’avoir ajouté un « t » à son prénom) « timide et tourmenté », un amoureux des mots, de la musique, de la poésie dont le film exalte le pouvoir et la beauté.

    Je ne manque jamais un film réalisé par François Ozon. Pour ses scénarii retors et labyrinthiques, pour ses thématiques récurrentes qu’il aborde toujours en empruntant une route sinueuse (le deuil, le mensonge, le désir souvent enfoui ou inavoué), pour son sens précis et implacable de la mise en scène (maligne, complice ou traitre) souvent riche de mises en abyme, pour sa capacité malgré la récurrence de ces thèmes à se réinventer. J’ai vu tous les films avec Pierre Niney (deux pièces de théâtre à la Comédie Française aussi, quel souvenir que son rôle d’Hippolyte dans Phèdre !) car l’intelligence de son jeu, sa capacité à se métamorphoser (il figure d’ailleurs à l’affiche de trois films très différents en 2016 : Five,  Frantz, L’Odyssée), à incarner finalement ce mensonge permanent qu’est le jeu d’acteur, ne cessent de me surprendre. Ces deux menteurs de haute voltige ne pouvaient que se rencontrer et, forcément, pour un film sur le mensonge, celui, salvateur, qu’on se raconte pour supporter la vérité. Et quel film ! Avant le film de François Ozon, il y a eu la pièce de théâtre de Maurice Rostand adaptée par Ernst Lubitsch en 1932 dans un film intitulé Broken Lullaby dont Frantz est le remake (scénario de François Ozon avec la collaboration de Philippe Piazzo).

    En 2001, Sous le sable, était le premier film de François Ozon sur le deuil et le refus de son acceptation. Charlotte Rampling refusait  ainsi d’accepter la mort de son mari tout comme ici Adrien et Anna sont éprouvés par la mort de Frantz qu’ils tentent de faire revivre à leur manière. L’un, Adrien, en évoquant leurs souvenirs communs. L’autre, Anna, en transformant Adrien en double de Frantz. Ainsi, Adrien voit Frantz quand il se regarde dans le miroir. Scène magnifiquement lyrique aussi lorsque leurs deux voix se superposent. Dans Une nouvelle amie, lorsque Claire et David révèlent leurs vraies personnalités en assumant leur féminité, travestissant la réalité, maquillant leurs désirs et leurs identités, c’est aussi pour faire face au choc dévastateur du deuil. Dans, déjà, Le temps qui reste, la mort rôdait, constamment, film sur les instantanés immortels d’un mortel qui en avait plus que jamais conscience face à l’imminence de l’inéluctable dénouement. « Nous avons tous perdu des êtres chers mais il faut continuer à vivre » « Je ne veux pas l’oublier », « On ne remplace jamais un être aimé, n’est-ce pas ? », « Je ne chante plus depuis la mort de mon fils ». Dans Frantz, les dialogues clament cette douleur ineffable et l’incompréhension qu’elle suscite, le gouffre dans lequel le deuil fait chuter et isole.

    A cela s’ajoute la confusion des sentiments qu’Ozon sait mieux que nul autre suggérer. Dans Une nouvelle amie, la souffrance commune de Claire et David, celle du deuil, va révéler une autre douleur commune, celle d’une personnalité qui les étouffe et n’est pas réellement la leur. Adrien a aussi une identité incertaine que sa mère qualifie de « fragile » et sa personnalité, attachante et trouble, constitue une des richesses de ce film multiple qui possède une structure dichotomique d’une rare intelligence : la France et l’Allemagne, Anna et Adrien (dont les prénoms commencent d’ailleurs par la même lettre), Adrien et Frantz. Frantz, Anna, Adrien, sont les miroirs les uns des autres. D’ailleurs, la caméra cadre souvent deux ou trois personnages. Parfois, elle se rapproche ou s’’éloigne brusquement comme les battements de cœur s’accélèrent, et tout comme les cœurs palpitent derrière l’apparente froideur du noir et blanc.  Ceux des personnages et du spectateur.

    Au lieu de créer une distance, au contraire, le noir et blanc procure un caractère intemporel au film, et la couleur qui, par moments, s’y substitue là encore avec un talent admirable (parfois dans un même plan) incarne le bonheur ou la clairvoyance qui, brusquement, surgissent et éclairent le film. La photographie qui rappelle parfois les films expressionnistes allemands est d’une beauté, d’une simplicité et d’une force renversantes. Difficile de croire que le noir et blanc était un choix économique et donc par défaut tant il apporte au film. Certaines images, d’une simplicité et d’une force bouleversantes, restent gravées comme ce plan d’Anna devant une croix ou d’Adrien qui écrit à la lueur d’une bougie ou encore d’Anna qui semble glisser dans l’eau. La composition de chaque plan relève de la perfection.

    Ozon avait comme référence le chef d’œuvre d’Haneke, Le ruban blanc, perfection du genre : somptuosité glaciale et glaçante de la réalisation,  perfection du cadre et des longs plans fixes aussi paralysants que l’inhumanité qui émane des personnages. Derrière ce noir et blanc, ces images d’une pureté étrangement parfaite, à l’image de ces chérubins blonds symboles d’innocence et de pureté (que symbolise aussi le ruban blanc qu’on leur force à porter) se dissimulent la brutalité et la cruauté. Le noir et blanc ici aussi dissimule, il est comme un voile sur la vérité.

    Ozon s’est aussi référé à un autre chef d’œuvre, celui de Kazan, La Fièvre dans le sang dont le titre original  Splendor in the grass  provient d’un poème de William Wordsworth Intimations of immortality from Reflections of Early Childhood qui dit notamment ceci: «Bien que rien ne puisse faire revenir le temps de la splendeur dans l’herbe…nous ne nous plaindrons pas mais trouverons notre force dans ce qui nous reste ». Ces vers sont repris au dénouement du film, ils reflètent toute la beauté désenchantée par laquelle il s’achève qui contraste tellement avec le premier plan du film qui symbolise tout le désir, toute la fureur de vivre qui embrase les deux personnages : un baiser fougueux dans une voiture derrière laquelle se trouve une cascade d’une force inouïe, métaphore de la violence de leurs émotions qui emportent tout sur leur passage. Ces vers pourraient aussi conclure le film d’Ozon comme un écho à la peinture par laquelle il s’achève. Et la scène du début de La Fièvre dans le sang  pourrait faire écho aux désirs contenus et réfrénés des personnages du film d’Ozon (peut-être de tous ses films d’ailleurs).

    Et que dire de cette musique qui vous étreint le cœur, tantôt intrigante comme celle de Bernard Herrmann, tantôt romanesque et lyrique, poignante. Comme les mots de Verlaine qui résonnent comme une mélopée ensorcelante et mélancolique. Comme certaines phrases qui en disent plus que de longs discours. Tranchantes. « Ma seule blessure, c’est Frantz ». Constamment le film  va à l’essentiel et nous touche droit au cœur. Le temps d’une valse. D’un air de violon. D’un regard, baissé, fuyant ou affronté. De quelques mots qui évoquent toute l’horreur de la guerre, mieux qu’une image sanglante. (« Le bruit est effroyable. ») C’est aussi la musique qui  porte et réunit Adrien (le violon que le père de Frantz appelle le « coeur de son fils ») et Anna, et qui les agressera, chacun de leur côté (nouvelle dichotomie et jeu de miroir). L’art devient alors une arme.  Comme un écho aux célèbres scènes de Casablanca de Michael Curtiz et  de La grande illusion de Renoir (certains plans rappellent d’ailleurs le cinéma de Renoir) lorsqu’Anna est « agressée » par la Marseillaise -magnifique scène- et Adrien par un chant allemand.

    Que ce film connaisse le succès me réjouit, lui qui fait l’éloge du doux mensonge, celui qui maquille la vérité pour la rendre plus supportable, alors que notre époque justement est avide de vérité, de transparence, et qu’elle bannit le mystère, souvent salutaire, que ce film exhale magnifiquement. L’illusion comme rempart contre le désespoir et l’inacceptable. Et donc le cinéma.

    Evidemment ce film ne serait pas ce qu’il est sans son remarquable casting, du père de Frantz (Ernst Stötzner) à la mère d’Adrien (Cyrielle Clair) sans oublier Alice de Lencquesaing (peu de scènes mais une forte présence) et évidemment ses deux acteurs principaux. Pierre Niney, une fois de plus, « est » son personnage dans un rôle qui relevait du défi. Il a ainsi appris l’allemand (ce qui contribue à l’authenticité du film, loin de ces films américains dans lesquels Allemands et Français parlent un anglais irréprochable), mais aussi la valse et le violon. Après avoir adopté la voix si particulière, la touchante complexité et l’élégante gaucherie de Yves Saint Laurent dans le film éponyme, et avoir appris à dessiner pour ce rôle (rôle qui lui a valu un César après deux nominations comme meilleur espoir pour J’aime regarder les filles  et pour Comme des frères dans lequel il incarnait un personnage burlesque, lunaire, attachant), après avoir incarné « un homme idéal » qui possédait le charme trouble, solaire et insondable de Tom Ripley dans « Plein soleil », à l’inverse, ce personnage incarne la vulnérabilité. Qu’il soit un personnage lunaire, un idéaliste, un menteur, un héros romantique, un artiste timide, ou qu’il jongle avec les Alexandrins, il reste tout aussi crédible. Et ici en jeune homme fragile, tourmenté, modifiant sa démarche, ses expressions, son phrasé, sobres, doux et lents. Le tout toujours avec autant d’implication, de justesse, de modernité. Face à lui, il fallait une actrice exceptionnelle et Paula Beer l’est indéniablement. Si le film confirme le talent de Pierre Niney, sa capacité à se transformer, à tout pouvoir jouer, à s’impliquer pleinement dans ses rôles, Paul Beer est la révélation du film. Elle incarne brillamment et avec une justesse sidérante la fragilité et la détermination, la force et la douceur d’Anna. Un sublime portrait de femme amoureuse, manipulatrice par bienveillance, blessée et combattante. Elle vient de recevoir le prix Marcello Mastroianni du Meilleur Espoir pour son rôle à la Mostra de Venise. Un prix amplement mérité.

    Que ce soit dans Potiche, Jeune et jolie, Dans la maison, Huit femmes, Une nouvelle amie, dans le cinéma de François Ozon, les êtres ne sont jamais réellement ce qu’ils paraissent. Ils cachent une blessure, un secret, leur identité, un amour, une culpabilité. Et au cinéma comme dans la vie, ce sont leurs failles et leurs mystères qui rendent les êtres complexes, différents, intéressants, attachants. Ses films sont souvent en trompe-l’œil, multiples et audacieux derrière une linéarité et un classicisme apparents. Manipulateur hors-pair, Ozon souvent fait l’éloge de l’illusion et ainsi de son propre art comme dans Dans la maison dans lequel il s’amusait avec les mots faussement dérisoires ou terriblement troublants et périlleux mais aussi avec les codes de l’art (« L’art nous éveille à la beauté des choses » pouvait-on entendre). Ici, à nouveau, il fait l’éloge de l’art (écriture, musique, peinture)-que Rilke soit le poète préféré d’Anna n’est ainsi pas anodin, lui qui dans Lettres à un jeune poète mieux que quiconque a su définir l’art et l’amour, et les liens qui les unissent-, l’art donc, pont entre les êtres, au-delà des frontières, même celles de la mort.

    Aussi envoûtant et ciselé qu’un vers de Verlaine, que « les sanglots longs des violons de l’automne », Frantz est un poème mélancolique, une valse élégante, une peinture fascinante et délicate, une musique troublante grâce au cadrage rigoureusement implacable, à la photographie d’une élégance à couper le souffle, au scénario brillant et aux dialogues précis et à l’interprétation d’une justesse remarquable. L’émotion quand elle est contenue tout comme la vérité, masquée, n’en sont que plus fortes, et au dénouement, vous terrassent. Et c’est le cas ici. Et surtout, au-delà de tout cela (mensonges, culpabilité, manipulation, désirs enfouis) et de cette présence étouffante des absents que le film dépeint magnifiquement, Frantz est un film magnifique sur la réconciliation et un hymne à la vie. Il fallait tout le talent du cinéaste pour, avec Le Suicidé (1877), le magnifiquement sinistre tableau de Manet, nous donner ainsi envie d’embrasser la vie.

    A la sortie de la projection, étourdie par autant de beauté, à l’exploitant qui demandait aux spectateurs ce qu’ils avaient pensé du film, j’ai souri et j’ai dit « sublime ». Simplement. Incapable de dire plus et mieux. Bouleversée et portée par le film. Et c'est la marque des grands films que de vous bousculer et de vous accompagner comme c’est le cas pour moi plusieurs jours après avoir vu ce film. Bouleversant. Poétique. Romanesque.  Sensible. Rare.

    Critique de JUSTE LA FIN DU MONDE de Xavier Dolan

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    Il y a des films, rares, qui possèdent ce supplément d’âme, qui exhalent cette magie indescriptible (la vie, au fond,  cette « vitalité » que François Trufffaut évoquait à propos des films de Claude Sautet) qui vous touchent en plein cœur, qui vous submergent d’émotion(s). Au-delà de la raison. Oui, c’est cela : un tourbillon d’émotions dévastatrices qui emportent notre raison avec elles. Comme un coup de foudre…Un coup de foudre cinématographique est ainsi comme un coup de foudre amoureux. Il anesthésie notre raison, il emporte notre rationalité, nous transporte, nous éblouit, et nous procure une furieuse envie d’étreindre le présent et la vie.

    Voilà ce que j’écrivais il y a deux ans à propos de Mommy en sortant de sa projection cannoise, film pour lequel Xavier Dolan avec obtenu le Prix du Jury du Festival de Cannes 2014. Voilà ce que je pourrais tout aussi bien écrire à propos Juste la fin du monde qui a reçu le Grand Prix du Festival de Cannes 2016 -dont vous pouvez lire mon premier bilan en cliquant ici- (mais aussi le prix du jury œcuménique dont le but est de récompenser des films « aux qualités humaines qui touchent à la dimension spirituelle »). « Cette récompense est inattendue et extrêmement appréciée » a ainsi déclaré Xavier Dolan à propos de son Grand Prix lors de la conférence de presse des lauréats après la clôture du festival.

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    Conférence de presse des lauréats du 69ème Festival de Cannes

    Juste la fin du monde est déjà le sixième film du jeune cinéaste québécois et marque déjà sa cinquième sélection cannoise : après J’ai tué ma mère, son premier film, sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs en 2009, après Les Amours imaginaires dans la sélection Un Certain Regard en 2010 puis en 2012 dans cette même sélection avec Laurence Anyways avant ses sélections en compétition officielle, en 2014 pour Mommy et en 2016 pour  Juste la fin du monde (avant lequel il avait aussi sorti Tom à la ferme).

    Adapté de la pièce de théâtre éponyme de Jean-Luc Lagarce, le film se déroule sur une après-midi. Un jeune auteur, Louis (incarné par Gaspard Ulliel), après 12 ans d’absence, retrouve sa famille pour lui annoncer sa mort prochaine. Il y a là sa mère (Nathalie Baye), son frère aîné (Vincent Cassel), sa petite soeur (Léa Seydoux) et sa belle-sœur qu’il rencontre pour la première fois (Marion Cotillard).

    Dès les premiers plans, dans cet avion qui emmène Louis vers sa famille et dès les premières notes et la chanson de Camille (dont le titre résonne comme un poignant avertissement, Home is where it hurts), une fois de plus, Dolan m’a embarquée dans son univers si singulier, m’a happée même, m’a enfermée dans son cadre. Comment ne pas l’être quand à la force des images et de la musique s’ajoute celle des mots, avec la voix de Louis qui, off, nous annonce son funeste programme : « leur annoncer ma mort prochaine et irrémédiable. En être l’unique messager. […] Me donner, et donner aux autres, une dernière fois, l’illusion d’être responsable de moi-même et d’être‚ jusqu’à cette extrémité‚ mon propre maître. » Tout ce qu’il ne parviendra jamais à dire, une annonce qui place les 1H35 qui suivent sous le sceau de la fatalité, et nous mettent dans la situation rageuse et bouleversante de témoin impuissant.

    J’ai eu la sensation de retenir mon souffle pendant 1H35, un souffle suspendu aux mots de Louis et de sa famille, et plus encore à leur silence, et de ne recommencer à respirer que bien après cette fin et ce dernier plan, sans aucun doute le plus beau de ce 69ème Festival de Cannes.

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    Louis est un auteur, un homme des mots et pourtant, ici, ses mots sont vains. Ils ne servent qu’à cacher, qu’à taire ce que les silences semblent crier avec éloquence. Sur le chemin qui  mène Louis vers sa famille, une pancarte entrevue sur le côté de la route interroge « Besoin de parler ? ». Oui, certainement, mais comment quand les logorrhées des uns et des autres l’en empêchent, quand sa famille ne sait communiquer que dans l’ironie, la colère ou l’invective ?

    Certains, peut-être, diront qu’il ne se passe rien. Sans doute n’auront-ils rien vu de tout ce que sous-entendent les regards, les silences, les excès, les cris, le bruit et la fureur. C’est pourtant hitchcockien. Un regard, un souffle, un mot de travers, un silence paralysant et tout semble pouvoir basculer dans l’irréversible. Le spectateur est à l’affut du moindre souffle, du moindre murmure, du moindre frémissement. Le MacGuffin, ce sont ces mots prononcés dans l’avion à l’attention du spectateur et qui attendent d’être délivrés et de s’abattre. Menace constante. « Le plus prenant c’est la nervosité et la prolixité de tous les personnages qui expriment des choses profondément superficielles, nerveuses, inutiles sauf ce qu’ils devinent être la raison de la venue de Louis » a ainsi expliqué Xavier Dolan lors de la conférence de presse des lauréats du festival.

    Sa caméra, par les gros plans dont est majoritairement composé le film, entoure, enserre, emprisonne, englobe les visages, au plus près de l’émotion, pour capter le mensonge, le non dit, pour débusquer ce qui se cache derrière le masque, derrière l’hystérie. Elle les asphyxie, isole Louis dans sa solitude accablante, absolue, les met à nu, les déshabille de ces mots vains, déversés, criés qui ne sont là que pour empêcher l’essentiel d’être dit. Comme un écho au format 1:1 qui, dans Mommy, par ce procédé et ce quadrilatère, mettait au centre le visage -et donc le personnage-, procédé ingénieux, qui décuplait notre attention. Dans Les Amours imaginaires, la caméra de Xavier Dolan était aussi au plus près des visages, ignorant le plus souvent le cadre spatial à l’image de cet amour obsédant qui rendait les personnages aveugles au monde qui les entourait. La mise en scène non seulement y épousait déjà le propos du film mais devenait un élément scénaristique : puisque les protagonistes s’y « faisaient des films » (l’un se prenant pour James Dean, l’autre pour Audrey Hepburn), et étaient enivrés par leur fantasmagorie amoureuse, par ce destructeur et grisant vertige de l’idéalisation amoureuse, le film en devenait lui-même un vertige fantasmatique.

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    Mais revenons à Juste la fin du monde. Que de douleur, de beauté, de significations dans les silences comme lors de cette scène, sublime, quand Louis prend sa mère dans les bras, qu’il s’y blottit, et qu’une petite parcelle de lumière caresse son visage en grande partie dans la pénombre, et que la musique sublime l’instant, qu’il regarde le vent qui s’engouffre dans les rideaux comme un appel de la vie qui s’enfuit. Que de choses la sensible Catherine dit-elle aussi dans ses silences, dans son flot de phrases absconses, dans ses hésitations, dans ses répétitions, elle qui semble dès le début savoir, et implorer une aide, elle que tout le monde semble mépriser et qui a compris ce que tous ignorent ou veulent ignorer ? Marion Cotillard, dans un rôle radicalement différent de celui de cette femme sauvagement vivante, enfiévrée, en quête d’absolu, qu’elle incarne dans le film de Nicole Garcia Mal de pierres (également en compétition officielle de ce Festival de Cannes 2016), est une nouvelle fois parfaite et semble converser dans ses silences.  « Sa parole était presque un silence sonore » a-t-elle dit lors de la conférence de presse, à propos de Catherine, son personnage, choisissant ses mots avec soin pour évoquer son rôle, toujours justes et d’une étonnante précision. "L'essentiel est que les gens entendent le murmure de la souffrance de chacun des personnages" a ainsi déclaré Xavier Dolan en conférence de presse. C’est indéniablement réussi. Cette souffrance étouffée tranche chacun des silences.

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    Nathalie Baye, comme dans  Laurence Anyways incarne la mère, ici volubile, outrancièrement maquillée, comme pour mieux maquiller, masquer, cette vérité qu’il ne faut surtout pas laisser éclater. « Dans ces imperfections, j’ai vu l’occasion de travailler avec des acteurs que j’admire pour leur demander d’exprimer ces imperfections humaines », a ainsi expliqué Xavier Dolan en conférence de presse. Gaspard Ulliel, remarquable dans le rôle du « roi » Louis, quant à lui, apporte au personnage une infinie douceur, et dans la lenteur de chacun de ses gestes, dans la tendresse mélancolique de chacun de ses regards et dans chacun de ses silences semble crier sa détresse indicible.

    Le langage est d’ailleurs au centre du cinéma de Xavier Dolan. Suzanne Clément, dans Mommy, mal à l’aise avec elle-même, bégayait, reprenant vie au contact de Diane et de son fils, comme elle, blessé par la vie, et communiquant difficilement, par des excès de violence et de langage, déjà. Et dans Laurence Anyways, Laurence faisait aussi de la parole et de l’énonciation de la vérité une question de vie ou de mort : « Il faut que je te parle sinon je vais mourir » disait-il ainsi.

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    Placé sous le sceau de la mort et de la fatalité, Juste la fin du monde n’en est pas moins parsemé de scènes étincelantes. Ainsi, quand Louis s’évade dans le passé, tout s’éclaire et rend le présent encore plus douloureux. La musique, de Gabriel Yared, somptueuse, apporte une note romanesque à l’ensemble, et des musiques judicieusement choisies et placées, souvent diégétiques, constituent des entractes musicaux et des échappées belles et lumineuses, presque oniriques, qui nous permettent de respirer comme cette chorégraphie de la mère et de la sœur de Louis sur un tube d’O-Zone ou lors de réminiscences d’un amour passé sublimé par le souvenir.

    Une fois de plus Xavier Dolan nous envoûte, électrise, bouleverse, déroute. Sans doute le film le plus intense de ce Festival de Cannes 2016, mais aussi le plus intense de Xavier Dolan, dans lequel chaque seconde, chaque mot ou plus encore chaque silence semblent vitaux ou meurtriers. J’en suis ressortie épuisée, éblouie, en larmes, après une fin en forme de valse de l’Enfer qui nous embrasse dans son vertige étourdissant et éblouissant, un paroxysme sans retour possible. Comme une apothéose : une fin du monde. Comme le bouquet final d’une démonstration implacable sur la violence criminelle de l’incommunicabilité. Tellement symptomatique d’une société qui communique tant et finalement si mal, incapable de dire et d’entendre l’essentiel ( ce qu’avait aussi si bien exprimé un film primé du prix de la mise en scène à Cannes, en 2006, Babel).

    Xavier Dolan se fiche des modes, du politiquement correct, de la mesure, de la tiédeur et c’est ce qui rend ses films si singuliers, attachants, bouillonnants de vie, lyriques et intenses. Que, surtout, il continue à filmer  les personnages en proie à des souffrances et des passions indicibles, qu'il continue à les filmer ces passions (et à les soulever), à préférer leur folie à « la sagesse de l’indifférence », c’est si rare... Surtout qu’il continue à laisser libre cours à sa fougue contagieuse, à son talent éclatant et iconoclaste, à nous emporter, nous happer dans son univers, et à nous terrasser d’émotions dans ses films et sur scène, comme lors de son discours de clôture, grand et beau moment qui a marqué la fin de ce 69ème Festival de Cannes :

    « L’émotion ce n’est pas toujours facile, il n’est pas toujours facile de partager ses émotions avec les autres.   La violence sort parfois comme un cri. Ou comme un regard qui tue ». « J’ai tenté au mieux de raconter les histoires et les émotions de personnages parfois méchants ou criards mais surtout blessés et qui vivent comme tant d’entre nous dans le manque de confiance dans l’incertitude d’être aimé. Tout ce qu’on fait dans la vie on le fait pour être aimé, pour être accepté. » […] « Plus je grandis plus je réalise qu’il est difficile d’être compris et paradoxalement plus je grandis et plus je me comprends et sais moi-même qui je suis. Votre témoignage, votre compréhension me laissent croire qu’il faut faire des films qui nous ressemblent, sans compromis, sans céder à a facilité, même si l’émotion est une aventure qui voyage parfois mal jusqu’aux autres, elle finit toujours par arriver à destination. J’étais ici il y a deux ans et je vivais un événement déterminant dans ma vie et en voici un autre qui changera encore mon existence. La bataille continue. Je tournerai des films toute ma vie qui seront aimés ou non et comme disait Anatole France, je préfère la folie des passions à la sagesse de l’indifférence. »

    Le film sortira en salles le 21 septembre 2016. Sans aucun doute y retournerai-je pour, à nouveau, être étourdie d’émotions par ce film palpitant. Merci Xavier Dolan et surtout continuez à oser, à délaisser la demi-mesure, la frilosité ou la tiédeur, à vous concentrer sur ceux qui voient ce que dissimulent le masque, la fantasmagorie, l’excès, la flamboyance et à ignorer ceux que cela aveugle et indiffère… et, surtout, continuez à nous foudroyer de vos coups que vous nous portez au cœur. En plein cœur.

    Remarque : le film a été produit par Nancy Grant à qui on doit notamment la production de Mommy mais aussi du  très beau Félix et Meira de Maxime Giroux.

    Critique de PATERSON de Jim Jarmusch

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    C’était le film le plus inclassable de la compétition du dernier Festival du Cinéma et Musique de La Baule (d'où il est reparti avec presque tous les prix, à l'unanimité du jury), oublié du palmarès du dernier Festival de Cannes (en salles le 21 décembre) .

    Paterson (Adam Driver) vit à Paterson, New Jersey, cette ville des poètes, de William Carlos Williams à Allan Ginsberg, une ville aujourd’hui en décrépitude. Chauffeur de bus d’une trentaine d’années, il mène une vie réglée aux côtés de Laura (Golshifteh Farahani), qui multiplie projets et expériences avec enthousiasme et de Marvin, l’inénarrable bouledogue anglais. Chaque jour, Paterson écrit des poèmes sur un carnet secret qui ne le quitte pas…

    Le film dont l’intrigue se déroule sur une semaine, est empreint de dualité et est construit en miroir avec une précision fascinante, une fausse simplicité, une douceur hypnotique, un rythme lancinant. Envoûtants. Sa lenteur, certes captivante, en rebutera peut-être plus d’un, pourtant pour peu que vous acceptiez ce rythme, la poésie contemplative du film vous happera progressivement pour vous plonger et vous bercer dans une atmosphère à la fois mélancolique et ouateuse.

    La dualité et la répétition sont partout. Dans le noir et blanc qui obsèdent la compagne de Paterson (un noir et blanc dont elle décore toute la maison, mais aussi les rideaux,  ses cupcakes, ses vêtements). Les jumeaux que le couple voit partout (en rêve pour l’une, dans son étrange réalité pour l’autre). Dans le patronyme « Paterson » qui est aussi celui de la ville où le protagoniste évolue et celle où a vécu le poète dont il s’inspire (William Carlos Williams). Sans oublier les journées répétitives : le réveil, le trajet à pied pour aller en travail, l’écriture d’ un poème dans son carnet secret toujours interrompue par l’arrivée de son patron déprimé, les conversations des passagers de son bus, le retour à la maison en redressant la boîte aux lettres que le chien fait chaque jour malicieusement tomber, les discussions avec sa femme, et la journée qui s’achève par la promenade du chien et la bière au café où une conversation ou un imprévu viennent aussi briser le rythme routinier. Un seul évènement viendra réellement bouleverser ce rythme répétitif tandis que le couple regarde un film de Jacques Tourneur au cinéma, punis d’avoir dérogés à ses habitudes quotidiennes.

    Décrit ainsi, le film pourrait paraître ennuyeux et banal. S’en dégage pourtant une beauté poétique qui sublime l’apparente simplicité de chaque instant, l’ennui routinier qui semble parfois peser sur Paterson (la ville, ville pauvre du New Jersey qui rappelle Détroit dans « Only  Lovers Left Alive » ) et sur Paterson, l’homme. Il regarde ainsi chaque soir les visages célèbres de la ville accrochés dans le bar où s’achèvent ses journées. Admiratif, il écoute une petite fille lui dire le poème qu’elle a écrit et qu’il admire. Il  écoute enfin un touriste Japonais lui vanter les poèmes de William Carlos Williams. Miroirs encore. Ceux de ses regrets, de ses échecs, de sa vie qui semble condamné à cette inlassable routine mais que sublime le plus beau des pouvoirs, celui de savoir jongler avec les mots qui résonnent aux oreilles du spectateur comme une douce et enivrante mélopée.

    Jarmusch, avec une acuité remarquable, capte l’extraordinaire dans l’ordinaire, le singulier dans le quotidien. Les vers qui s’écrivent sur l’écran et la voix de Paterson qui les répète inlassablement est une musique qui s’ajoute à celle de Sqürl, le groupe de Jim Jarmusch, et qui nous charme insidieusement pour finalement nous faire quitter à regrets cet univers réconfortant, tendrement cocasse, et poétique.

    Le film a reçu l’Ibis d’or du meilleur film à La Baule mais aussi celui du meilleur acteur pour Adam Driver et de la meilleure actrice pour Golshifteh Farahani. La tendre nonchalance du premier, sa bienveillance envers l’attendrissante folie de sa femme (Golshifteh Farahani, toujours d’une justesse remarquable) sont en effet pour beaucoup dans le l’enchantement irrésistible de ce poème terriblement séduisant.

    Critiques de MOI, DANIEL BLAKE de Ken Loach et  de CAFE SOCIETY de Woody Allen

    Cliquez ici pour lire mes critiques de ces deux films dans mon compte rendu du Festival de Cannes 2016 dans le cadre duquel j'ai découvert ces films.

    En bonus, ma critique de MOMMY de Xavier Dolan que le Cinéville de Laval vous permet de revoir cette semaine.

     

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    Petite digression avant d’évoquer le film : je me souviens avoir lu dans le petit journal du Festival Lumière, en 2014,  que Xavier Dolan est « un très grand fan » d’Un cœur en hiver de Claude Sautet, alors projeté à Lyon dans le cadre de la rétrospective consacrée à ce dernier, accessoirement mon film préféré dont je ne me lasse pas de vous parler et dont vous pourrez retrouver ma critique, en cliquant ici. Voilà qui me rassure, moi qu’on regarde toujours avec circonspection (au mieux) quand je parle de ce film avec passion.

    Mommy, c’est Diane Després (Anne Dorval), surnommée…Die (l’ironiquement bien nommée), une veuve qui hérite de la garde de son fils, Steve, un adolescent TDAH impulsif et violent (Antoine-Olivier Pilon). Ils tentent de surmonter leurs difficultés, notamment financières. Sur leurs routes, ils vont trouver Kyla (Suzanne Clément), l’énigmatique voisine d’en face, qui va leur venir en aide.

    Il y a des films, rares, singuliers, qui possèdent ce supplément d’âme ineffable, qui exhalent cette magie indicible (la vie, au fond,  cette « vitalité » dont Truffaut parlait à propos des films de Claude Sautet, on y revient…) qui vous touchent en plein cœur, qui vous submergent d’émotion(s). Au-delà de la raison. Oui, c’est cela : un tourbillon d’émotions dévastatrices qui emportent notre raison avec elles. Comme un coup de foudre…Un coup de foudre cinématographique est comme un coup de foudre amoureux. Il rend impossible toute raison, tout raisonnement, il emporte notre rationalité, nous transporte, nous éblouit, et nous donne une furieuse envie d’étreindre le présent et la vie. Et de croire en l’avenir.

    La situation vécue par Diane et son fils est âpre et chaotique mais Xavier Dolan l’auréole de lumière, de musique et d’espoir. Dès les premières minutes, avec ces éclats de lumière et du soleil qui caressent Diane, la magie opère. Xavier Dolan nous happe dans son univers pour ne plus nous lâcher jusqu’à la dernière, bouleversante, seconde. Un univers éblouissant, étourdissant, dans la forme comme dans le fond qui envoûte, électrise, bouleverse, déroute. En un quart du seconde, il nous fait passer du rire aux larmes, mêlant parfois les deux, mêlant aussi l’emphase et l’intime (il n’est finalement pas si étonnant que Titanic  soit un de ses films de prédilection) avec pour résultat cette émotion, ce mélodrame poignant, poétique, fougueux, étincelant, vivace. Débordant de vie.

    Certaines scènes (nombreuses) sont des moments d’anthologie, parfois à la frontière entre (mélo)drame et comédie. Il y a  notamment cette scène onirique qui raconte ce que la vie aurait pu être « si » Steve n’avait pas été malade et qui m’a bouleversée. Que peut-il y avoir de plus bouleversant que de songer à ce que la vie pourrait être « si »…? Ou encore cette scène où, dans un karaoké, si fier, Steve chante Andrea Bocelli, sous les quolibets, et alors que sa mère a le dos tourné, nous faisant éprouver avec lui la douleur qu’il ressent alors, la violence, contenue d’abord, puis explosive.

    Mommy, c’est donc Anne Dorval qui incarne avec une énergie débordante et un charme et un talent irrésistibles cette mère révoltée, excentrique et pudique, exubérante, malicieuse, forte et blessée qui déborde de vitalité et surtout d’amour pour son fils. Suzanne Clément, plus en retrait, mal à l’aise avec elle-même (elle bégaie) et la vie,  est tout aussi touchante et juste, reprenant vie au contact de Diane et son fils, comme elle, blessé par la vie, et communiquant difficilement. Ces trois-là vont retrouver l’espoir au contact les uns des autres, se charmer, nous charmer. Parce que si le film raconte une histoire dramatique, il déborde de lumière et d’espoir. Un film solaire sur une situation sombre, à la fois exubérant et pudique, à l’image de Diane.

    Le film ne déborde pas seulement de lumière et d’espoir mais aussi d’idées brillantes et originales comme le format 1:1 qui n’est pas un gadget ou un caprice mais un vrai parti pris formel qui crée une véritable résonance avec le fond (Xavier Dolan l’avait déjà utilisé sur le clip College Boy d’Indochine en 2013) sans parler de ce format qui se modifie au cours du film (je vous laisse découvrir quand et comment, scène magnifique) quand l’horizon s’élargit pour les trois protagonistes.  Par ce procédé et ce quadrilatère, le visage -et donc le personnage- est au centre (tout comme il l’est d’ailleurs dans les films de Claude Sautet, et si Un cœur en hiver est mon film préféré, c’est notamment parce que ses personnages sont d’une complexité passionnante). Grâce à ce procédé ingénieux, rien ne distrait notre attention qui en est décuplée.

    Les films de Xavier Dolan, et celui-ci ne déroge pas à la règle, se distinguent aussi par une bande originale exaltante, entraînante, audacieuse, judicieuse, ici Céline Dion, Oasis, Dido, Sarah McLachlan, Lana del Rey ou encore Andrea Bocelli. Un hétéroclisme à l’image de la folie joyeuse qui réunit ces trois êtres blessés par la vie qui transporte littéralement le spectateur.

    Bien sûr plane l’ombre d’Elephant de Gus Van Sant mais ce film et le cinéma de Xavier Dolan en général ne ressemblent à aucun autre.  Sur les réseaux (a)sociaux (je repense à cette idée de Xavier Dolan -qui, comme Paolo Sorrentino et Pedro Almodovar, dans le cadre du Festival Lumière, comme le veut désormais la tradition du festival, a été invité à tourner sa version de « La sortie des usines Lumière »,- qui a choisi de demander à ses acteurs d’un jour de se filmer eux-mêmes pour montrer le narcissisme et l’égoïsme des réseaux dits sociaux), certains critiquent la précocité de Xavier Dolan encensée par les médias. Sans doute de la jalousie envers son indéniable talent. D’ailleurs, plus que de la précocité, c’est une maturité qui m’avait déjà fascinée dans Les amours imaginaires. Je m’étais demandée comment, à 21 ans, il  pouvait faire preuve d’autant de perspicacité sur les relations amoureuses. Je vous recommande au passage Les amours imaginaires, cette fantasmagorie pop et poétique sur la cristallisation amoureuse, sur ces illusions exaltantes et destructrices, sublimes et pathétiques, un film enivrant et entêtant comme… un amour imaginaire.

    Mommy est le cinquième film, déjà, de Xavier Dolan. C’est d’autant plus fascinant qu’il ne se « contente » pas de  mettre en scène et de diriger, magistralement, ses acteurs mais qu’il est aussi scénariste, monteur, producteur, costumier. Ici, il ne joue pas (en plus de tout cela, c’est aussi un très bon acteur), se trouvant trop âgé pour le rôle d’Antoine-Olivier Pilon qui crève d’ailleurs littéralement l’écran et dont le personnage, malgré ses excès de violence et de langage, emporte la sympathie du spectateur.

    Vous savez ce qu’il vous reste à faire (le film est encore à l’affiche) si vous voulez, vous aussi, ressentir les frissons savoureux procurés par le poignant Mommy de Dolan, fable sombre inondée de lumière, de musique, de courage, quadrilatère fascinant qui met au centre son antihéros attachant et sa mère dans un film d’une inventivité, maturité, vitalité, singularité,  émotion rares et foudroyantes de beauté et sensibilité. Un coup de foudre, vous dis-je.

    Les mots de Xavier Dolan lors de son discours de clôture du Festival de Cannes ont profondément résonné en moi. Un discours qui résume toute la force et la beauté de la création artistique, la violence et la légèreté surtout qu’elle suscite, qui permet de croire que, malgré les terribles vicissitudes de l’existence, tout est possible. Tout reste possible. Merci Xavier Dolan pour ce moment d’émotion sincère et partagé, pour ces films à votre image, vibrants de vie, de passion, de générosité, d’originalité, de folie, de singularité, d’intelligence. J’aurais aimé vous dire tout cela lorsque je vous ai croisé lors du dîner/buffet de clôture au lieu de passer mon chemin. Mais redoutant que mes mots ne soient à la hauteur de mes émotions et de la vôtre, j’ai préféré me taire et rester avec les mots si vibrants de votre discours dont voici un extrait :

     « Une note pour les gens de mon âge, les jeunes de ma génération. Ce sont les notes des dernières années dans ce monde de fous. Malgré les gens qui s’attachent à leurs goûts et n’aiment pas ce que vous faites, mais restez fidèles à ce que vous êtes.  Accrochons nous à nos rêves, car nous pouvons changer le monde par nos rêves, nous pouvons faire rire les gens, les faire pleurer. Nous pouvons changer leurs idées, leurs esprits. Et en changeant leurs esprits, nous pouvons changer le monde. Ce ne sont pas que les hommes politiques et les scientifiques qui peuvent changer le monde, mais aussi les artistes. Ils le font depuis toujours. Il n’y a pas de limite à notre ambition à part celles que nous nous donnons et celles que les autres nous donnent. En bref, je pense que tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais. Et puisse ce prix en être la preuve la plus rayonnante ».

  • Mon avis sur l'hôtel Périer du Bignon à Laval et concours (un accès pour 2 au spa à gagner)

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    Pour connaître le règlement et pour participer au concours pour remporter ce cadeau de Noël, cliquez ici pour vous rendre immédiatement sur mon site Inthemoodforhotelsdeluxe.com sur lequel figure le concours.

    Désormais la ville de Laval dispose de son hôtel 4 étoiles, l’Hôtel Périer du Bignon (qui existait déjà auparavant mais n’avait pas été homologuée, non pas que l’hôtel ne le méritait pas mais son propriétaire ne le souhaitait tout simplement pas), à deux pas du centre ville, et surtout l’adresse idéale pour visiter la ville, se reposer, ou profiter de vacances dans la région. J’espère que mes quelques photos ci-dessous et ci-dessus vous convaincront de venir découvrir cette ville souvent méconnue mais pourtant magnifique. (Vous en trouverez d’autres sur mon compte instagram @sandra_meziere ).

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    Construit par Pierre Périer du Bignon au 18ème siècle, cet hôtel classé monument historique, se situe juste à côté de la salle polyvalente (sans les nuisances sonores car le lieu est d’un calme salutaire) et du vieux Laval par lequel vous pouvez aussi y accéder, vous donnant le sentiment d’arriver dans un lieu à la fois majestueux et discret, à l’abri des regards.

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    Chaque chambre possède un décor différent et unique. A n’en pas douter, vous en trouverez une à votre goût, qu’il soit plus classique, baroque, romantique, que vous aimiez les couleurs plus vives ou les tons plus clairs. Chaque chambre vous procure en tout cas l’impression d’être invité dans une belle demeure de famille, bourgeoise, cossue et chaleureuse, la plupart avec cheminée(s) qui renforce(nt) cette impression de maison familiale et non moins cosy et luxueuse. Les chambres sont particulièrement spacieuses et leur grandeur renforce cette impression de luxe et de sérénité.

     

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    Ma préférence va à la suite « perle fine » que j’ai eu le grand plaisir de découvrir et qui vient juste d’être ouverte à la commercialisation comme 4 autres suites toutes neuves, très différentes, mais toutes très confortables et spacieuses.

    Toutes les chambres sont dotées de splendides salles de bain, certaines suites possèdent douches et baignoires, bains à remous …

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    Dans le bâtiment initial, vous trouverez également 3 suites, placées face au jardin à la française, alliant confort et sérénité en vous offrant un espace de luxe travaillé dans les moindres détails. Pour deux d’entre elles, un coin salon et un lit king size de très grand confort sont à votre disposition. Leurs spacieuses salles de bain vous permettront de choisir entre une douche ou un bain accompagné de produits d’accueil et peignoirs brodés. Vous pourrez aussi profiter de la suite familiale avec vue imprenable sur la vieille ville.

    Au printemps, ce seront au total 11 nouvelles chambres qui auront été construites. L’ancienne maison attenante va par ailleurs intégrer l’hôtel avec au programme  25 chambres de 20 m2. L’établissement totalisera alors 70 chambres.

    Toutes les chambres sont équipées du WIFI et donnent accès à la piscine. Deux chambres sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

    Pour bien commencer votre journée,  vous pourrez également profiter d’un petit-déjeuner continental à 13,50€ proposé au buffet ou en chambre de 7h00 à 10h00.

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    Que vous soyez là pour un séjour d’affaire, romantique ou familial, vous y trouverez votre bonheur en raison de l’emplacement idéal de l’hôtel mais aussi des services proposés : Spa avec sauna, hammam, jacuzzi mais aussi piscine chauffée d’avril à octobre à laquelle vous pouvez accéder depuis une terrasse solarium, idéale pour se reposer été comme hiver, et pour profiter du calme du jardin. Pour sublimer ces moments de détente, le spa de l’hôtel Périer du bignon s’associe avec la marque française Sothys, synonyme de sensualité et de raffinement, référence du spa et du bien-être depuis plus de soixante-dix ans, dans les spas du monde entier. Dans cet espace dédié au bien-être, vous trouverez également deux salles de soin. Sur place se trouvent aussi des esthéticiennes formées au savoir-faire Sothys. Elles pourront vous prodiguer des soins du corps ou du visage comme l’express coup d’éclat de 30 minutes pour 30 euros.

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    Les Lavallois qui souhaitent découvrir le Spa peuvent réserver leur accès pour 30 euros pour deux, un tarif vraiment attractif pour une pause sereine presque en plein centre-ville. D’ailleurs, il se pourrait que je me laisse tenter, notamment pour avoir le plaisir d’accéder à la piscine chauffée extérieure et au jacuzzi.

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    Pour vous restaurer, vous pourrez profiter du restaurant L’épicurien qui vous propose une cuisine gastronomique et des produits frais de saison. J’y consacrerai ultérieurement un article lorsque je l’aurai testé mais ces quelques photos des plats me mettent d’ores et déjà l’eau à la bouche.  L’été, vous pourrez profiter d’un diner ou d’un déjeuner paisible sur la terrasse, à l’ombre des arbres ou celle des parasols rythmés par le clapotis de la fontaine ou le chant des oiseaux. Le restaurant vous accueille du lundi au vendredi de 12h00 à 13h30 et de 19h00 à 21h00 et le samedi soir de 19h00 à 21h00. L’épicurien est fermé le samedi midi et le dimanche (sauf sur réservation de groupe de plus de 20 personnes).

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    Sachez qu’il reste de la place pour le jour du Nouvel an. N’hésitez pas à réserver. Voici les menus que vous pourrez avoir le plaisir de déguster (à un tarif très abordable, a fortiori pour un restaurant gastronomique).

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    Autre atout non négligeable : l’hôtel possède un garage de 20 places et un parking privé.

    Vous pourrez aussi profiter de sa chapelle pour organiser évènement professionnel ou privé

    Le Périer du Bignon est aussi un lieu parfait pour les mariages, la salle de réception pouvant recevoir jusqu’à 170 convives et son décor romantique sied parfaitement à ce genre de réception. Les jeunes mariés pourront ensuite profiter de la suite « Romantique poudrée ».

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    A l’image de la ville qui l’accueille, ce bel hôtel qui possède le même charme indéniable reste malheureusement méconnu. Pourquoi ne pas profiter d’un séjour au Périer du Bignon pour les découvrir ? Seul 4 étoiles de la ville, Le Périer du Bignon est sans aucun doute l’adresse idéale pour visiter la ville de Laval, une bâtisse d’exception datant du 18ème, magnifiquement rénovée tout en conservant son caractère, empreinte de sérénité, décorée avec soin, un hôtel chaleureux et intimiste, avec tous les services nécessaires pour faciliter et agrémenter votre séjour (garage, piscine, spa…) et bien sûr tous ces détails indissociables d’un 4 étoiles (peignoirs, chaussons, grand écran, wifi gratuit…).

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    C’est en tout cas sans aucun doute l’adresse que je choisirais pour séjourner à Laval, que ce soit pour un séjour d’agrément ou d’affaires. Alors, conquis ?

    Hôtel Perier Du Bignon

    7 rue de Marchis – 53000 Laval

    Tél : 02 43 49 90 00

    Facebook : www.facebook.com/pages/Perier-du-Bignon/

    http://www.hotelperierdubignon.fr/ 

    Le Périer du Bignon est aussi désormais sur instagram (@perier_du_bignon ) et sur twitter (@perierdubignon ) . N’hésitez pas à le suivre !

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    Concours :

    Pour ceux qui souhaiteraient découvrir l’établissement et profiter de son atmosphère sereine mais aussi de son magnifique spa, j’ai le plaisir, en partenariat avec l’hôtel, de vous faire gagner une journée au spa pour deux (d’une valeur de 30 euros) agrémentée d’une boisson chacun (café, thé, ou boisson rafraichissante). Le lauréat n’aura ensuite qu’à réserver le jour de son choix (bon utilisable sous 6 mois donc avant le 20 juin 2017).

    Horaires d’ouverture :

    De 14h à 20h du lundi au vendredi et le week-end de 9h à 12h et de 14h à 20h.

    Pour connaître le règlement et participer au concours pour remporter ce cadeau de Noël, cliquez ici pour vous rendre sur mon site Inthemoodforhotelsdeluxe.com sur lequel figure le concours et pour accéder directement au concours.

  • Critique de LA TÊTE HAUTE d'Emmanuelle Bercot, en présence de la réalisatrice, le 24 janvier, à Laval

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    Le 24 janvier, à 19H30, au Cinéville de Laval, sera projeté le film "La tête haute" d'Emmanuelle Bercot, un film qui avait créé l'évènement en faisant l'ouverture du 68ème Festival de Cannes. C'est dans ce cadre que j'avais eu le plaisir de le découvrir. Ci-dessous, ma critique suite à cette projection et mon compte rendu de la conférence de presse cannoise à laquelle j'avais également assisté. Un rendez-vous à ne pas manquer, le 24 janvier.

    Critique du film « La tête haute » d’Emmanuelle Bercot

    Le temps de débarrasser la scène du Grand Théâtre Lumière des apparats de l’ouverture de ce 68ème Festival de Cannes, et nous voilà plongés dans un tout autre univers : le bureau d’une juge pour enfants (Catherine Deneuve), à Dunkerque. La tension est palpable. Le ton monte. Les éclats de voix fusent. Une femme hurle et pleure. Nous ne voyons pas les visages. Seulement celui d’un enfant, Malony, perdu au milieu de ce vacarme qui assiste, silencieux, à cette scène terrible et déroutante dont la caméra frénétique accompagne l’urgence, la violence, les heurts. Un bébé crie dans les bras de sa mère qui finalement conclut à propos de Malony qu’il est « un boulet pour tout le monde ». Et elle s’en va, laissant là : un sac avec les affaires de l’enfant, et l’enfant, toujours silencieux sur la joue duquel coule une larme, suscitant les nôtres déjà, par la force de la mise en scène et l’énergie de cette première scène, implacable. Dix ans plus tard, nous retrouvons les mêmes protagonistes dans le même bureau …

    Ce film est réalisé par Emmanuelle Bercot dont j’avais découvert le cinéma et l’univers si fort et singulier avec « Clément », présenté à Cannes en 2001, dans le cadre de la Section Un Certain Regard, alors récompensé du Prix de la jeunesse dont je faisais justement partie cette année-là. Depuis, je suis ses films avec une grande attention jusqu’à « Elle s’en va », en 2013, un très grand film, un road movie centré sur Catherine Deneuve, « né du désir viscéral de la filmer ». Avant d’en revenir à « La tête haute », je ne peux pas ne pas vous parler à nouveau de ce magnifique portrait de femme sublimant l’actrice qui l’incarne en la montrant paradoxalement plus naturelle que jamais, sans artifices, énergique et lumineuse, terriblement vivante surtout. C’est aussi une bouffée d’air frais et d’optimisme qui montre que soixante ans ou plus peut être l’âge de tous les possibles, celui d’un nouveau départ. En plus d’être tendre (parfois caustique mais jamais cynique ou cruel grâce à la subtilité de l’écriture d’Emmanuelle Bercot et le jeu nuancé de Catherine Deneuve), drôle et émouvant, « Elle s’en va » montre que, à tout âge, tout peut se (re)construire, y compris une famille et un nouvel amour. « Elle s’en va » est de ces films dont vous ressortez émus et le sourire aux lèvres avec l’envie d’embrasser la vie. ( Retrouvez ma critique complète de ELLE S'EN VA en cliquant ici.)

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    Et contre toute attente, c’est aussi l’effet produit par « La tête haute » où il est aussi question de départ, de nouveau départ, de nouvelle chance. Avec beaucoup de subtilité, plutôt que d’imprégner visuellement le film de noirceur, Emmanuelle Bercot a choisi la luminosité, parfois le lyrisme même, apportant ainsi du romanesque à cette histoire par ailleurs particulièrement documentée, tout comme elle l’avait fait pour « Polisse » de Maïwenn dont elle avait coécrit le scénario. Le film est riche de ce travail en amont et d’une excellente idée, celle d' avoir toujours filmé les personnages dans un cadre judiciaire : le bureau de la juge, des centres divers… comme si toute leur vie était suspendue à ces instants.

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    Le grand atout du film : son énergie et celle de ses personnages attachants interprétés par des acteurs judicieusement choisis. Le jeune Rod Paradot d’abord, l’inconnu du casting qui ne le restera certainement pas longtemps et qui a charmé l’assistance lors de la conférence de presse cannoise du film, avec son sens indéniable de la répartie (« la tête haute mais la tête froide »…), tête baissée, recroquevillé, tout de colère rentrée parfois hurlée, dont la présence dévore littéralement l’écran et qui incarne avec une maturité étonnante cet adolescent insolent et bravache qui n’est au fond encore que l’enfant qui pleure des premières minutes du film. Catherine Deneuve, ensuite, une nouvelle fois parfaite dans ce rôle de juge qui marie et manie autorité et empathie. L’éducateur qui se reconnaît dans le parcours de ce jeune délinquant qui réveille ses propres failles incarné par Benoît Magimel d’une justesse sidérante. La mère (Sara Forestier) qui est finalement l’enfant irresponsable du film, d’ailleurs filmée comme telle, en position fœtale, dans une très belle scène où les rôles s’inversent. Dommage (et c’est mon seul bémol concernant le film) que Sara Forestier ait été affublé de fausses dents (était-ce nécessaire ?) et qu’elle surjoue là où les autres sont dans la nuance, a fortiori les comédiens non professionnels, excellents, dans les seconds rôles.

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    Ajoutez à cela des idées brillantes et des moments qui vous cueillent quand vous vous y attendez le moins : une main tendue, un « je t’aime »furtif et poignant, une fenêtre qui soudain s’est ouverte sur « Le Monde » (littéralement, si vous regardez bien…) comme ce film s’ouvre sur un espoir.

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    Après « Clément », « Backstage », «  Elle s’en va », Emmanuelle Bercot confirme qu’elle est une grande scénariste et réalisatrice (et actrice comme l'a prouvé son prix d'interprétation cannois) avec qui le cinéma va devoir compter, avec ce film énergique et poignant, bouillonnant de vie, qui nous laisse avec un salutaire espoir, celui que chacun peut empoigner son destin quand une main se tend et qui rend un bel hommage à ceux qui se dévouent pour que les enfants blessés et défavorisés par la vie puissent grandir la tête haute. Un film qui « ouvre » sur un nouveau monde, un nouveau départ et une bouffée d’optimisme. Et ça fait du bien. Une très belle idée que d’avoir placé ce film à cette place de choix d'ouverture du 68ème Festival de Cannes et de lui donner cette visibilité.

    Conférence de presse

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    Ci-dessous, quelques citations de la conférence de presse du film à laquelle j’ai assisté à Cannes. Une passionnante conférence au cours de laquelle il a été question de nombreux sujets, empreinte à la fois d’humour et de gravité, puisqu’a aussi été établi un lien entre le choix de ce film pour l’ouverture et les récents événements en France auxquels le film fait d’ailleurs, d’une certaine manière, écho. Vous pouvez revoir la conférence sur le site officiel du Festival de Cannes. Dommage que Catherine Deneuve (étincelante) ait eu à se justifier (très bien d’ailleurs, avec humour et intelligence) de propos tenus dans la presse, extraits de leur contexte et qui donnent lieu à une polémique qui n’a pas de raison d’être.

    « Je tenais à ce que tout soit absolument juste » -Emmanuelle Bercot (à propos de tout ce qui se passe dans le cadre judiciaire où elle a fait plusieurs stages avec ce souci de vraisemblance et même de véracité). « Les personnages existaient avant les stages puis ont été nourris par la part documentaire ».

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    « La justice des mineurs est un honneur de la France » – Emmanuelle Bercot

    « Si c’est méchant, j’espère que c’est drôle ». – Catherine Deneuve à propos d’une question d’une journaliste au sujet de la caricature de Charloe Hebdo (très cruelle) à son sujet et qu’elle n’avait pas encore vue.

    « C’était très important pour moi que ce film ait son socle dans le Nord. » Emmanuelle Bercot

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    « Ouvrir le festival avec ce film est aussi une réponse à ce début d’année difficile qu’a connu la France. » Catherine Deneuve

    « En France, les femmes cinéastes ont largement la place de s’exprimer et énormément de femmes émergent. » E.Bercot

    « Moi c’est le scénario qui m’a beaucoup plu et tous les personnages. C’est un scénario qui m’a plu tout de suite. » Catherine Deneuve

    « Pour être star, il faut du glamour et du secret, ne pas tout montrer de sa vie privée. » – Catherine Deneuve

    « Il y a une matière documentaire très forte dans l’écriture, en revanche je ne voulais pas un style documentaire dans l’image. » Bercot

    Sara Forestier : « A la lecture du scénario, j’ai pleuré. Le film m’a piqué le coeur. »

    « C’est totalement inespéré que ce film soit à une telle place, c’est un grand honneur. » Emmanuelle Bercot

  • Photos de Laval (épisode 2) : Instameet sur le Vallis Guidonis et flâneries lavalloises

    A l'initiative de Mayenne Créative (@MayenneCreative sur Instagram) avec la complicité de l'office de tourisme de Laval, était organisé un "Instameet", c'est-à-dire une rencontre entre utilisateurs d'Instagram en Mayenne, sur le Vallis Guidonis. L'occasion de voguer sur la Mayenne, de découvrir notre belle ville de Laval sous un angle différent et de voir les illuminations de près.  Vous retrouverez mes clichés ci-dessous ainsi que deux ou trois autres pris lors de mes flâneries lavalloises. Retrouvez d'autres photos sur mon compte Instagram @sandra_meziere.

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  • En dédicace au Cultura de Laval / St Berthevin le samedi 3 décembre 2016 de 10H à 18H

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    En 2016, j'ai eu le plaisir de réaliser un "vieux" rêve: être publiée, en papier et numérique. Les Editions du 38 ont en effet publié mon premier roman "L'amor dans l'âme" (en avril) puis mon recueil de 16 nouvelles sur les festivals de cinéma "Les illusions parallèles" (fin août 2016). La publication (à compte d'éditeur, évidemment) est un parcours du combattant. Se faire ensuite connaître des lecteurs en est un autre. Les rencontres dédicaces en sont toujours une belle et réjouissante occasion. 

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    J'ai dédicacé le premier dans le cadre du Festival du Premier roman de Laval où j'ai également débattu sur "Comment la jeune littérature appréhende-t-elle le monde" en compagnie de Kiko Herrero, Antoine Mouton, François Bégaudeau et François-Henri Désérable puis chez Corneille et M'Lire. Le deuxième m'a permis de faire une succession de dédicaces en festivals de cinéma, aux 4 coins de la France, puis à nouveau chez M'Lire à Laval. Avant de dédicacer à nouveau chez Corneille, j'aurai le plaisir de rencontrer les Mayennais à l'occasion d'une rencontre dédicace au Cultura de Laval/ St Berthevin, le samedi 3 décembre 2016, de 10H à 18H.

    Ci-dessous, vous trouverez un petit texte sur la genèse de mon premier roman et les quatrièmes de couverture de chacun de ces livres qui vous en diront plus sur le contenu. Vous pouvez aussi consulter les pages que leur consacre mon éditeur, Les Editions du 38, qui vous donneront plus d'informations: pour "L'amor dans l'âme", ici, et pour "Les illusions parallèles", là.

    Vous pouvez donc trouver ces deux livres chez Corneille, M'Lire, Cultura, les commander dans n'importe quelle autre librairie en France mais aussi sur Amazon, Fnac etc..., en papier ou numérique, et bien sûr sur le site de mon éditeur, Les Editions du 38.

    Retour sur la genèse de mon roman "L'amor dans l'âme" (texte publié lors de sa publication):

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    Avant, il y a eu des balbutiements, des tentatives d'écriture(s). "L'amor dans l'âme" est mon vrai premier roman. A la fin du mois de mars, il sera disponible en librairie, en papier. Il sera aussi disponible en numérique. Alors, il sera peut-être sous vos yeux et il ne m’appartiendra plus. Petite, mon rêve était déjà de publier un roman. Alors, vous comprenez, c’est un saut dans le vide et un rêve d’enfance. Très tôt, il y a eu des quantités de livres dévorés, et surtout, il y a eu le cinéma. Une autre passion de l’enfance. Qui a changé le cours de ma vie. Qui imprègne d’ailleurs ce roman. Un roman sinueux, labyrinthique, cinématographique. Dans les lieux où il se déroule, les références, la structure. Plus récemment, il y a un peu plus de deux ans, il y a eu le fracas de la réalité. Un fracas assourdissant. La mort. Ineffable. Impensable. La part de rêve que, malgré tout, elle ne sera pas parvenue à annihiler.
     
    L’écriture, la nécessité, viscérale, vitale même, d’écrire a été plus forte. Le chant fougueux des mots pour affronter le silence tétanisant de la disparition. Ecrire pour affronter l’indicible. Un cri de colère au départ.  Des coups au cœur. Des bleus à l’âme. Un élan du cœur, peut-être. Et les mots, rageurs ou langoureux, comme seul rempart, seule issue. Inéluctables.
     
    Ce bonheur-là, rien ne peut le briser : inventer un univers, ciseler une phrase, me laisser être accompagnée par elle, hantée parfois, la tordre, la déchiqueter, la reconstruire, la modeler, se reconstruire, l’effacer, s’effacer devant les mots qui s’imposent. Jusqu’à l’obsession. Jusqu’à l’oubli de soi et de ses blessures. Un pansement. Une parenthèse. Fugaces et enivrants.
     
    En dehors de ma maison d’édition, personne n’a encore lu ce roman. Un roman c’est une confiance, celle d’un éditeur, en l’occurrence une éditrice. Une confiance sans laquelle je ne pourrais et n’oserais vous le livrer. Grâce à son regard aiguisé, son empathie, sa confiance. Merci à elle à nouveau car écrire c’est aussi sans cesse repousser les doutes qui vous murmurent et vous assènent inlassablement que c’est une folie, une inconscience, une vanité. Et les miens savent être vindicatifs et bruyants.
     
    Il faut une dose de folie sans doute aussi pour livrer une part de soi. Parce que si ce sont des personnages, si c’est une fiction, un roman, c’est toujours une part de soi. Une vérité légèrement mensongère. Un espace de liberté. De vérité. D’audace peut-être. Mais sûrement pas de courage. Le vrai courage, il a dicté l’envie et la rage et la nécessité d’écrire ce roman, et il lui est dédié.
     
    J’ai hâte d’avoir le plaisir d’échanger avec vous sur ce livre et sur le sujet qui en a dicté l’écriture. Vos avis et commentaires seront toujours les bienvenus.
     
    Son titre est donc « L’amor dans l’âme ». La mort dans l’âme, au départ. "L’amor" l’emporte sur la mort, peut-être, finalement. A vous de voir.
     
    Ce roman, je l’ai aussi écrit pour des bienveillants. Il vous appartient désormais. Il va prendre son envol. Vivre sa vie. Je partagerai ici ses aventures, et celles qu’il me fera vivre. Un débat dans un festival de premier roman auquel j’ai le plaisir d’être conviée et une séance de dédicaces dans une librairie sont déjà prévus, je vous en dirai bientôt plus.
     
     

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    Quatrième de couverture et couverture L'amor dans l'âme.jpg

     

  • DEMAIN TOUT COMMENCE de Hugo Gélin en avant-première au Cinéville de Laval le 4 décembre 2016 - Critique

    cinéma, Laval, Mayenne, Cinéville

    Après une première projection publique de "Demain tout commence", le nouveau film d'Hugo Gélin, qui a eu lieu à Laval il y a quelques semaines, grâce au distributeur Mars,  une nouvelle avant-première aura lieu le dimanche 4 décembre à 16H, au Cinéville de Laval. C'est indéniablement un des meilleurs films de cette année 2016 qui sortira en salles le 7 décembre. Je l'ai vu pour vous en avant-première au Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule 2016. Retrouvez ma critique ci-dessous.

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    Dans le cadre du 3ème Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule (dont vous pourrez bientôt lire ici mon compte rendu complet) était présenté en avant-première le nouveau film d’Hugo Gélin, « Demain tout commence » que j’attendais avec d’autant plus d’impatience que j’étais tombée littéralement sous le charme de son premier film en tant que réalisateur « Comme des frères » , un road movie attachant et la comédie tendrement mélancolique de l’année 2012 qui, comme chez Claude Sautet (ceux qui me lisent régulièrement savent que c’est pour moi une référence suprême), célébrait l’amitié, qu’elle soit amoureuse ou plus fraternelle. Et vous donnait envie d’aimer furieusement la vie. Voilà d’ailleurs un des nombreux points communs entre les deux longs-métrages réalisés par Hugo Gélin.

     Il en va des films comme des personnes, rares certainement, qui d’emblée, par leur charme indéfinissable et ineffable, vous séduisent, vous emportent dans leur univers, dans un tourbillon d’émotions, vous font oublier qu’existent un ailleurs, une réalité, et auxquels vous pouvez tout pardonner. Et qui, une fois le voyage avec eux terminé, ne vous donnent qu’une envie: reprendre un ticket pour un nouveau tour de manège.  C’était le cas de "Comme des frères”. C’était aussi le cas d’un classique projeté dans le cadre du festival, « Itinéraire d’un enfant gâté » de Claude Lelouch. Et c’est le cas de ce nouveau film, un remake de la comédie mexicaine réalisée par Eugenio Derbez, « Ni repris ni échangé », tournée en 2013.  Mais dire que ce film est un remake est réducteur tant le réalisateur y apporte son style, son regard, son univers, sa sensibilité, sa bienveillance.

    Samuel, incarné par Omar Sy, vit sa vie sans attaches ni responsabilités, au bord de la mer sous le soleil du sud de la France, près des gens qu’il aime et avec qui il travaille sans trop se fatiguer. Jusqu’à ce qu’une de ses anciennes conquêtes, Kristin, (Clémence Poésy) lui laisse sur les bras un bébé de quelques mois, Gloria : sa fille ! Incapable de s’occuper d’un bébé et bien décidé à rendre l’enfant à sa mère, Samuel se précipite à Londres pour tenter de la retrouver, sans succès. 8 ans plus tard, alors que Samuel et Gloria ont fait leur vie à Londres et sont devenus inséparables, la mère de Gloria revient dans leur vie pour récupérer sa fille…

    Ce synopsis est là aussi un peu réducteur car il ne résume par la magie, la tendre drôlerie, et le rythme trépidant qui se dégagent des premières minutes qui vous happent, vous captivent, capturent  votre attention, pour ne plus vous lâcher jusqu’à la dernière seconde. Le film commence par une magnifique parabole de la peur et de la vie qui prend tout son sens dans les dernières minutes. Samuel nous entraîne ensuite dans son rythme de vie échevelé. Le charisme indéniable, le rire si singulier et communicatif qui emporterait le sérieux du plus acariâtre et stoïque des spectateurs, l’énergie folle déployée par Omar Sy font démarrer le film sur les chapeaux de roue. Ce qui marque aussi de prime abord, c’est l’élégance et le dynamisme de la réalisation (profondeur de champ, plans, décors, costumes et photographie travaillés avec soin) qui exacerbent le charme qui se dégage  du personnage principal et l’envoûtement quasi immédiat que le film opère sur le spectateur.

    A Londres (magnifiquement filmée, le voyage auquel il nous convie participant aussi du charme du film), nouvelle ambiance et nouveau voyage pour le spectateur, transporté avec Samuel dans une autre vi(ll)e, qui passe du soleil du sud à la pluie d’outre-Manche. L’empathie, pour ce grand enfant immature et insouciant (« On ne fait pas de gosse à un autre gosse » dit-il d’ailleurs à Kristin) soudain confronté à des responsabilités d’adulte et égaré dans une ville dont il ne parle pas (et ne parlera jamais vraiment) la langue, est immédiate. A Londres, il fait la connaissance de Bernie (formidable Antoine Bertrand, acteur québécois que nous avons notamment pu voir dans « Starbuck ») qui lui aussi tombe immédiatement sous le charme et va lui venir en aide. Judicieuse ellipse. Nous retrouvons alors Samuel devenu cascadeur pour le cinéma (Bernie est producteur) dont l’appartement ressemble à un parc d’attractions dans lequel tout est fait pour que la petite Gloria soit la reine des lieux  tout comme Roberto Benigni inventait un jeu pour permettre à son fils d’affronter l’horreur indicible, pour lui faire croire à ce doux mensonge : la vie est belle (dans le film éponyme).

    Avec le retour de la mère de Gloria, et une annonce que je vous laisse découvrir, le film se teinte peu à peu de couleurs plus dramatiques. Avec ces menaces qui planent, les scènes drôles et parfois aux frontières du burlesque gagnent encore en force tout comme les drames de la vie nous font savourer avec plus de vigueur et d’intensité ses moments de joie.

    La petite Gloria Colston qui incarne Gloria est d’une justesse remarquable et sidérante. Son personnage possède la maturité qui fait (apparemment) défaut à son père, et un charme aussi indéniable que ce dernier. Après Pierre Niney dans « Comme des frères » (ce dernier avait certes auparavant tourné dans le magnifique « J’aime regarder les filles » de Frédéric Louf mais c’est « Comme des frères » qui l’a fait connaître auprès du grand public, il ne serait d’ailleurs pas étonnant de le retrouver face à Omar Sy lors des prochains César, tant il le mérite à nouveau pour son rôle dans « Frantz » de François Ozon), Hugo Gélin est décidément aussi un remarquable découvreur et directeur d’acteurs. Chaque réplique est ciselée, sonne et touche juste.

    Ce film comme le précédent possède la beauté troublante et le charme renversant de ces êtres qui portent un masque d’insouciance pour dissimuler leurs fêlures et les blessures de l’existence, et qui n’en sont que plus touchants. Pour incarner ce masque de pudeur et de bienveillance, ce père qui aime sa fille inconditionnellement, il fallait un acteur exceptionnel et d’une sensibilité rare.  Omar Sy, après « Samba » et « Chocolat » (pour lequel il mérite aussi à mon  sens une nomination aux César, tant il y est remarquable) prouve la large palette de son talent et qu’il est un des acteurs les plus brillants de sa génération et surtout qu’il n’a pas fini de nous émouvoir et de nous surprendre.  Clémence Poésy  apporte de l’humanité à son personnage, si fragile, et qu’il n’était pas facile de défendre.

    Et comme dans les meilleures comédies anglaises avec lesquelles « Demain tout commence » peut rivaliser sans rougir, la BO contribue à cette magie. Nous la devons ici au compositeur américain Rob Simonsen  notamment auteur des BO de « 500 jours ensemble », « Foxcatcher », « The Spectacular Now » ou plus récemment de « Nerve ». Comme ses consœurs comédies dramatiques britanniques, je gage d’ailleurs que « Demain tout commence » fera rapidement partie de ces films jubilatoires et insidieusement mélancoliques que l’on ne peut s’empêcher de revoir chaque année, a fortiori au cœur de l’hiver.

    Avec « Comme des frères », le deuxième long-métrage d’Hugo Gélin en tant que réalisateur possède aussi en commun des personnages attachants,  une vitalité,  un montage et un scénario habiles et malins (qui multiplie les rebondissements qui toujours nous cueillent, tant pis pour les rabat-joie  que leur récurrence laissera de marbre), et sont finalement aussi l’un et l’autre de splendides métaphores du cinéma et des mensonges nécessaires qu’il nous raconte pour que la vie soit  moins âpre. Souvent, j’ai envie de dire aux frileux et timorés qui se laissent bercer par la vie, cette ensorceleuse, qui se laissent endormir même, à ceux qui ne mesurent pas à quel point elle peut être fourbe, imprévisible, brève, à quel point le simple fait d’être là avec ceux qui la partagent, est une chance inouïe, qu’il faut en saisir, enchanter, sublimer chaque seconde, et donner plus d’intensité à chacun de nos battements de cœur. Ce film en est l’éclatante et irréfutable démonstration.

    Alors prenez votre ticket pour ce tour de manège sans temps mort, cette magnifique histoire d’amour paternel, cet hymne à la vie et aux liens du cœur qui parfois priment sur ceux du sang, ce délicieux mensonge qui, lorsqu’il s’achèvera et délivrera ses derniers secrets, vous laissera KO, de gratitude, d’émotion, dont vous réaliserez que chaque seconde vous a rappelé à quel point la vie est belle. Malgré tout. Malgré les vicissitudes du destin. Un film qui bouleversera a fortiori ceux qui portent les cicatrices des blessures de la vie. J’en suis d’ailleurs sortie bouleversée. Littéralement. Chavirée d’émotions. Comme rarement. Mais aussi avec l’idée revigorante que « demain tout commence », le très beau titre inspiré d'une phrase de Bachelard que la grand-mère du cinéaste avait coutume de répéter. Et quel plus bel hommage à celle-ci et à cette phrase que ce film généreux, lumineux, tendre, drôle, au charme décidément irrésistible, à l’image de son duo d’acteurs principaux ! Sans aucun doute un des meilleurs films de l’année qui vous rappelle que la vie est le plus beau des risques et qui, croyez-moi, vous procurera une envie irrépressible d’empoigner et d’étreindre l’existence et ceux que vous aimez. Intensément. Follement. La magie du cinéma dans toute sa splendeur. Alors n’oubliez pas : demain, tout commence…

  • Photos - Quelques clichés de Laval (épisode 1)

    Je prends très régulièrement des photos de Laval publiées sur mon compte Instagram @sandra_meziere et sur mon compte twitter consacré à Laval @Lavalloise53. En voici quelques-unes.

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